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La continuité digitale, compagne du devoir de durabilité

Thomas Bachellerie & Jacques Bacry
7 août 2023

L’intégration des exigences de Développement Durable est devenue l’un des enjeux majeurs de chaque secteur industriel. Aéronautique, automobile, énergie, produits de grande consommation…

Tous sont remis en question, au moins en partie, au regard de leur impact sociétal et environnemental. Chaque filière doit maintenant réussir à se transformer suffisamment vite pour répondre à ces exigences nouvelles.  La Continuité Digitale est un allier de taille avec lequel il faut compter.

La publication en début d’année de la synthèse des rapports du GIEC n’est qu’un des multiples rappels pressant à intégrer partout et tout le temps l’enjeu Développement Durable dans les organisations et notamment chez les industriels. Actionnaires et monde financier, consommateurs et citoyens, donneurs d’ordres et clients, réglementations françaises et européennes, les pressions sont multiples.

L’exigence de durabilité représente une couche de complexité supplémentaire à prendre en compte, générant des interdépendances toujours plus fortes pour les produits et services autour de leur performance énergétique, leur empreinte carbone, leur réparabilité, leur recyclabilité sans compter les multiples dimensions sociales et sociétales de leur conception, fabrication, acheminement jusqu’à l’utilisateur final, réparation / maintenance et la gestion de leur fin de vie. C’est aussi un nouveau point de vue à adopter sur la performance industrielle et produit, comme un pas de côté qui pousse à concevoir de nouveaux optimum vertueux, possédant notamment l’impact environnemental le plus limité.

Certaines démarches font partie intégrante des processus, grâce à l’engagement RSE des entreprises (c’est souvent le cas de la gestion des déchets) ou parce qu’elles sont directement liées à la performance opérationnelle (comme la recherche de consommations optimales d’énergie). Pour autant, toutes les industries ne positionnent pas encore la durabilité aux mêmes niveaux de leur stratégie puisque, à l’instar de la digitalisation, les temps de cycles des programmes conduisent à décaler les mesures les plus importantes sur cet enjeu sur le prochain cycle industriel.

Cependant, le cadre règlementaire va immanquablement raccourcir ce temps long et obliger les entreprises à prouver leur résilience face aux impacts du changement climatique et s’adapter aux scénarios de transition socio-économiques décidés par les différentes instances politiques (ex : fin de la vente des véhicules thermiques en 2035, etc.).

Un enjeu stratégique pour demain

L’ampleur des transformations à accomplir est telle que les organisations doivent repenser leur fonctionnement à 360°. Concevoir et fabriquer un produit durable implique d’arrêter la démarche incrémentale pour repenser l’ensemble de l’écosystème de l’entreprise, dans une approche transverse et end-to-end. Par exemple, les bouleversements liés à l’utilisation de nouvelles énergies nécessitent de repenser des filières, parfois entièrement, et de positionner différemment certains acteurs dans les nouvelles chaines de valeurs. Cela implique aussi de mettre en place plusieurs dizaines de nouveaux indicateurs, avec une mesure fiable, opposable à des tiers. Il faut pouvoir vérifier en temps réel la conformité aux trajectoires, à chaque étape de la vie d’un produit ou d’un processus, pour agir avant qu’il ne soit trop tard, et embarquer l’ensemble de ses fournisseurs dans la même démarche. Plus largement, l’éco-responsabilité constitue un pilier de la marque employeur pour recruter et garder de jeunes ingénieurs en quête de sens et qui veulent faire partie de la solution.

Les nouvelles combinatoires, les alternatives à explorer, l’obligation de simuler rapidement font que seules les technologies digitales sont capables de gérer cette complexité aux multiples dimensions (humaines, financières, opérationnelles). Elles seules sont capables de mobiliser de la donnée, qui doit être propre, organisée, honnête, fiable et partageable. Maîtriser la donnée est d’autant plus important qu’elle devient une preuve dont il va falloir prouver l’authenticité tant à ses donneurs d’ordre qu’à ses auditeurs. Elle devient un enjeu contractuel de plus en plus fort.
La valeur de la donnée, sa pertinence, son stockage en volume important et son exploitation deviennent un enjeu stratégique. Les bases de connaissances sont aujourd’hui le carburant de bon nombre d’applications et de services qui utilisent l’intelligence artificielle. On considère que nous sommes dans une transition qui voit la valeur changer de propriétaire. Jusqu’à très récemment, elle appartenait aux sociétés créatrices de logiciels. Aujourd’hui, les sociétés capables de stocker et vendre de gros volumes d’informations pertinentes ont raflé la mise.

On l’a dit, dans ce défi de la durabilité, les notions d’éco-responsabilité, d’impact carbone et de consommation de ressources doivent se traduire en métriques contextualisées et pertinentes (avant de devenir des actions et évolutions comportementales à tous les niveaux jusqu’à l’opérateur).
La prise de hauteur est indispensable pour observer non seulement les données, mais surtout leurs interconnexions. Grâce à la continuité digitale, la position haute est activable.

Le rôle de la Continuité Digitale pour la Sustainability

L’atout majeur de la Continuité Digitale est qu’elle remet de l’objectivité-là, il n’y en avait pas toujours. Par exemple, elle sait calculer le coût carbone global d’un produit tout au long de la chaîne de valeur et dans son optimisation en allant chercher des éléments objectifs, à toutes les étapes de sa vie.

On l’a décrit dans les articles précédents, la Continuité Digitale officie sur les terrains de la virtualisation, de la simulation, de l’intégration (de plateformes, de systèmes, de software et de hardware), de la connectivité et ne peut s’envisager que dans un environnement hautement sécurisé.

Grâce à sa capacité de structuration, et lorsqu’elle est amplifiée par l’existence de jumeaux numériques, la Continuité Digitale offre des leviers d’intérêt majeurs pour les organisations tournées vers l’atteinte de leurs objectifs de durabilité. Elles vont pouvoir enrichir leurs capacités de simulation et viser : 

  • une intégration PLM + ERP + LCA afin de redéfinir des principes de conception avec moins d’incohérence, une intégration by design des principes de sobriété permettant d’être plus clair, plus efficace et revenir sur des aberrations de process / design qui engendre des pertes ;
  • une réduction des risques d’anomalies physiques pour optimiser les durées de vie des produits ;
  • une révision des cycles de production permettant moins de gâchis de matière et une plus grande sobriété d’utilisation des ressources ;
  • une intégration des données environnementales de la production comme facteur de conception du produit (si je simplifie le design, je réduis le temps de fabrication et donc la consommation en énergie par exemple).

Le fait de réintégrer les résultats d’expériences réelles dans la chaîne de continuité digitale constitue un atout majeur pour la convergence. La Continuité Digitale revêt ici encore son costume de transformation globale, qui ne se limite pas aux bureaux d’étude et à la connexion avec l’usine. Elle est un outil de soutien à l’organisation industrielle dans son intégralité, véritable compagne de la performance industrielle globale. Si elle est correctement utilisée et si les parties prenantes décident d’étendre son périmètre d’intervention habituel actuel, elle peut – et doit – devenir le fer de lance de la performance environnementale industrielle, garantissant l’efficience globale du cycle et œuvrant pour un monde plus durable.

Auteurs :

Thomas Bachellerie

Manufacturing & Process Engineering Unit Director, Capgemini Engineering

Jacques Bacry

Executive Vice President – Digital Continuity & Convergence Group Offer Leader
Diplômé universitaire en informatique, spécialisé en IA, Jacques prend à la fin des années 90 le poste de VP R&D pour développer l’infrastructure et la modélisation des marques Dassault Systèmes. Il est l’un des pères de l’architecture V5 et a créé le modèle original de modélisation de la base de fonctionnalités de CATIA et l’a promu à travers de grands projets PLM auprès de tous les groupes internationaux des plusieurs branches de l’industrie. Aujourd’hui, Jacques dirige l’activité PLM groupe, accompagnant l’ensemble des organisations pour déployer la stratégie de l’offre groupe.
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