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L’industrie automobile est-elle en bonne voie d’atteindre ses objectifs de durabilité ?

17 oct. 2022

Selon un nouveau rapport de Capgemini :

  • Le niveau de maturité des initiatives durables dans l’ensemble de l’industrie n’est aujourd’hui pas suffisant pour réduire sensiblement les émissions et atteindre les objectifs de l’Accord de Paris.
  • L’investissement dans ces initiatives est en baisse – passant de 1,22% du chiffre d’affaires annuel en 2019 à 0,85 % en 2022 en moyenne par an – et devrait stagner d’ici 2026 à 0,86% du chiffre d’affaires par an.
  •  Les fournisseurs automobiles investissent une part plus importante de leur chiffre d’affaires (0,93%) dans le développement durable que les constructeurs (0,79%).
  • Un petit groupe d’entreprises, à la pointe en termes de déploiement de programmes durables impactants, ont déjà réalisé une amélioration de 9%, en moyenne, de leurs émissions depuis 2018, contre 5% pour l’ensemble du secteur.

Paris, Le 17 octobre 2022 – Selon le nouveau rapport du Capgemini Research InstituteSustainability in Automotive : From Ambition to Action (Le développement durable dans l’industrie automobile : de l’ambition à l’action), le niveau de déploiement de programmes durables[1] d’importance dans l’industrie automobile n’a progressé que marginalement depuis 2019, et a même reculé dans certains domaines. Les défis récents rencontrés par le secteur, tels que les pénuries de semi-conducteurs et les perturbations au niveau de la chaîne d’approvisionnement, ont forcé les organisations automobiles à recentrer leurs priorités.

Selon le rapport, des directives telles que Le Pacte vert pour l’Europe et L’Accord de Paris poussent l’industrie automobile à rechercher des solutions plus durables pour atteindre les objectifs de neutralité carbone. Une grande majorité (70%) de l’industrie automobile concentre ses actions sur la réduction globale des émissions, y compris les émissions de portée 1, 2 et 3[2], tout au long de la chaîne de valeur, de l’approvisionnement aux processus de fin de vie. Deux tiers (64%) des entreprises du secteur prévoient de réduire leurs émissions carbone d’ici 2040, et 57% vont au-delà de la conformité ESG pour faire de la durabilité un facteur commercial clé. Cependant, depuis 2018, l’industrie automobile a réduit ses émissions globales de gaz à effet de serre de seulement 5%, et une réduction supplémentaire de 19% devrait être réalisée d’ici 2030. Au rythme actuel, les organisations automobiles ne sont pas en ligne pour atteindre l’objectif global de neutralité carbone d’ici 2050 de l’Accord de Paris.

L’étude constate que seul un petit groupe d’entreprises (moins de 10%) montre la voie vers une industrie automobile durable. Ces entreprises indiquent qu’elles prévoient de réduire leurs émissions de gaz à effet de serre de 35% d’ici à 2030 (contre 19% en moyenne pour l’industrie automobile dans son ensemble). Dans le même temps, leur efficacité opérationnelle devrait s’améliorer de 22% à horizon 2026 (contre 16% pour le reste des organisations sur la même période), en lien direct avec leurs initiatives durables venant renforcer la transparence de leur chaîne de valeur. Elles bénéficient également d’une “marque employeur” plus forte les rendant plus attrayantes auprès des candidats (18% contre 10% pour les autres).

Le déploiement des initiatives durables n’a progressé que dans certains domaines spécifiques

Les entreprises du secteur automobile se concentrent sur la réduction des émissions et donnent la priorité aux initiatives sur lesquelles elles ont un contrôle et une influence directs, comme la fabrication et la décarbonation des flottes de véhicules. Selon le rapport, le déploiement d’initiatives au niveau de la chaîne d’approvisionnement a progressé entre 2019 et 2022 de 42% à 57% ; de même, pour l’approvisionnement responsable en métaux qui est passé de 33% à 44% sur la même période.

Cependant, le rapport montre un recul de la mise en œuvre d’initiatives d’économie circulaire. Alors que 73% des organisations conviennent que la contribution à une économie circulaire est une nécessité pour atteindre leurs objectifs financiers et concurrentiels à long terme, seules 53% d’entre elles ont mis en place une stratégie d’économie circulaire, et moins de la moitié (45%) adhèrent actuellement aux principes de circularité[3] tout au long de leur chaîne de valeur.

La transition vers les véhicules électriques reste complexe et ne représente qu’une partie de la solution

La nécessité de réduire les émissions de gaz à effet de serre a poussé les constructeurs automobiles à concentrer leurs efforts sur les véhicules électriques. Pour obtenir un réel impact tout au long de la durée de vie d’un véhicule électrique, il est essentiel que les fabricants d’équipements d’origine (OEM) appliquent les principes de circularité dans leur processus de fabrication et sur l’ensemble de la chaîne de valeur, et également tiennent compte de la fin de vie des batteries. Moins de la moitié (41%) des dirigeants interrogés indiquent que leur entreprise a mis en place une initiative de développement durable pour la fin de vie des batteries ; ce chiffre tombe à 28% pour les batteries de seconde vie. Malgré l’augmentation des ventes de véhicules électriques, les clients sont réticents à passer à l’électrique en raison de l’angoisse liée à l’autonomie et aux coûts de recharge et le marché des pièces de rechange pour les véhicules à moteur à combustion interne ainsi que les options d’entretien sont plus accessibles. L’augmentation des coûts de l’énergie électrique ainsi que la complexité des méthodes de recharge freinent la progression et l’adoption des véhicules électriques.

L’absence d’indicateurs de performance entraîne une stagnation du déploiement des initiatives durables.

Le rapport révèle que la mauvaise intégration des indicateurs clés de performance en matière de développement durable dans les activités quotidiennes et la gestion des performances entraîne une stagnation de sa mise en œuvre : 73% des dirigeants interrogés s’accordent à dire que l’adoption de pratiques de développement durable dans leurs activités et processus quotidiens n’a augmenté que marginalement ou a stagné au cours des deux ou trois dernières années. Seuls 10% des organisations ont aligné les objectifs de performance sur les principaux objectifs de durabilité pour les employés non-cadres. La difficulté à collecter, gérer et analyser les données relatives à la durabilité est également l’un des principaux défis rencontrés : seuls 12% des dirigeants déclarent aujourd’hui que leur organisation a déployé à grande échelle une plateforme pour mesurer, surveiller et rendre compte des initiatives de durabilité.

Alors même que, pour définir les objectifs et partager les progrès des initiatives de durabilité, il est impératif de responsabiliser l’entreprise dans son ensemble selon le rapport. À l’heure où les parties prenantes examinent à la loupe la conformité aux critères ESG, les données provenant de l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement doivent être quantifiées afin de faire preuve de transparence et de fournir une base de référence permettant de définir des indicateurs clés de performance de l’entreprise.

Intégrer la durabilité dans le business modèle

Alors que les réglementations deviennent plus strictes et que les attentes des consommateurs et de la société ne cessent d’augmenter, les entreprises automobiles doivent être réalistes quant aux niveaux d’investissement actuels et prévus. Au moment de la transition des véhicules à moteur à combustion interne vers les véhicules électriques, l’industrie automobile est sur le point d’entrer dans une décennie cruciale. Si les grandes entreprises se sont bien positionnées pour ce changement, une approche plus holistique est nécessaire, prenant en compte les nouveaux modes de fonctionnement et respectueuse des personnes et de la planète.

« L’industrie automobile entre dans une décennie cruciale qui sera largement conditionnée par sa capacité à passer au tout-électrique. Mais, alors même que la durabilité est reconnue comme une priorité absolue, le secteur dans son ensemble prend du retard. Si elles veulent atteindre les objectifs de 2050 fixés par l’Accord de Paris, les entreprises automobiles doivent réfléchir de manière pratique à leur approche de la durabilité. Cela passe par un engagement significatif et renouvelé envers l’économie circulaire qui soit centré sur le cycle de vie complet du véhicule, ainsi que par la prise en compte des émissions de portée 3, » déclare Alexandre Audoin, à la tête du secteur Automobile chez Capgemini. « Une responsabilisation à tous les niveaux de l’entreprise est impérative pour permettre la définition d’objectifs durables et indicateurs clés de performance et progresser sur la bonne voie. »

Pour en savoir plus et accéder au rapport, cliquez ici.

Méthodologie

Le Capgemini Research Institute a interrogé, sur la période de juillet-août 2022, 1 080 dirigeants travaillant dans des grandes entreprises du secteur automobile – équipementiers ayant un chiffre d’affaires annuel supérieur à 1 milliard de dollars ; fournisseurs ; constructeurs de véhicules électriques ‘pure players’ – dans 9 pays. Les personnes interrogées sont responsables de la stratégie d’entreprise, de la stratégie produit, de la planification, des finances, de la chaîne d’approvisionnement, de la durabilité, de l’après-vente, des services de mobilité, des ventes et du marketing, de la fabrication et de la production, des opérations, de l’informatique, de l’ingénierie, de la R&D et de la conception, directeurs ou cadres supérieurs, responsables de la stratégie, des initiatives, de la gouvernance et des investissements de l’entreprise en matière de durabilité, et de leur impact. Pour cette étude, 20 entretiens approfondis ont également été menés avec des dirigeants et des experts du secteur. 


[1] Le développement durable dans l’industrie automobile implique une vision globale des opérations, processus, produits et services respectueux de la planète et de l’être humain. Cela inclut une série d’éléments allant de la “R&D et du développement de produits durables” à l'”informatique durable” et couvre la chaîne de valeur automobile, de la conception R&D aux services de mobilité. Dans le cadre de cette étude, le Capgemini Research Institute s’est concentré parmi les trois piliers “ESG” sur la durabilité environnementale.

[2] Les émissions de gaz à effet de serre du Scope 1 sont des émissions directes libérées dans l’atmosphère qui proviennent de sources détenues ou contrôlées. Les émissions du Scope 3 sont les émissions indirectes de gaz à effet de serre autres que les émissions du Scope 2 qui sont générées dans l’économie au sens large. Elles sont produites par les activités d’une entité, mais proviennent de sources non détenues ou contrôlées par les activités de l’entité en question. Citons par exemple l’extraction et la production de matériaux achetés, le transport de carburants achetés, l’utilisation de services et produits vendus. Le Scope 3 inclut également les émissions associées à la sous-traitance des activités liées à l’élimination des déchets solides et au traitement des eaux usées. Certaines émissions du Scope 3 peuvent également provenir des pertes transport et distribution (T&D) associées à l’électricité achetée.

[3] Une économie circulaire vise à maintenir la valeur des produits, matières et ressources aussi longtemps que possible en les renvoyant dans le cycle des produits à la fin de leur utilisation, tout en minimisant la production de déchets. Moins nous jetons de produits, moins nous extrayons de matières, mieux notre environnement se porte. Ce processus commence au tout début du cycle de vie d’un produit : des processus intelligents de conception et de production des produits peuvent contribuer à économiser des ressources, à éviter une gestion efficace des déchets et à créer de nouvelles opportunités économiques. Source : https://ec.europa.eu/eurostat/fr/web/circular-economy/