Adoptée par la Commission Européenne en juillet 2024, la Corporate Sustainability Due Diligence Directive (CSDDD ou CS3D) impose aux entreprises opérant dans l’UE d’identifier, de prévenir, d’atténuer et de rendre compte des impacts négatifs de leurs activités sur les droits humains et sur l’environnement, y compris dans leur chaîne de valeur.  

Elle introduit également un devoir de vigilance et des risques de sanctions en cas de manquement. Destinée à encourager des pratiques plus durables et plus transparentes pour les consommateurs, cette directive a été vivement critiquée pour sa complexité et la sévérité des sanctions envisagées.  

Une nécessaire poursuite des efforts 

En réponse, l’Omnibus Package, publié début 2025, prévoit diverses mesures destinées à assouplir les exigences du texte initial. Cette nouvelle mouture de la CS3D continue tout de même de refléter la volonté de l’UE d’instaurer un modèle économique plus responsable et plus transparent.

L’obligation pour les grandes entreprises de mettre en place une politique de vigilance, d’intégrer la durabilité dans leur gouvernance, de surveiller les impacts négatifs dans leur chaîne de valeur directe et d’impliquer les parties prenantes concernées reste maintenue, tout comme le devoir d’agir pour prévenir ou atténuer les atteintes graves aux droits humains et à l’environnement.  

Les entreprises sont donc largement incitées à poursuivre leurs efforts de transformation durable. Chez Capgemini, nous sommes convaincus de la nécessité de considérer la CS3D comme une opportunité de renforcement de la résilience business. Sans révision de la chaîne d’approvisionnement, certains produits, risquent, à terme, de ne plus pouvoir être commercialisés.  

En outre, le changement climatique devrait augmenter les risques de rupture d’approvisionnement, avec des incidences évidentes sur les opérations et le chiffre d’affaires de l’entreprise. En alignant performance économique avec responsabilité, transparence et durabilité, les réglementations telles que la CS3D constituent ainsi de véritables accélérateurs de transformation, bien au-delà d’un contexte législatif par nature mouvant.  

Trois cas d’usage concrets qui illustrent les opportunités business d’une mise en conformité CS3D : 

  1. Sécuriser l’approvisionnement : pour optimiser la production en maîtrisant les coûts 

La CS3D exige la publication d’une cartographie des risques relatifs aux droits humains et aux normes environnementales sur toute la supply chain. En effectuant l’analyse de leurs sous-traitants et fournisseurs afin d’identifier ceux susceptibles de présenter des risques environnementaux et sociaux, les entreprises sont en mesure d’identifier rapidement les problèmes d’irrégularités ou de non-conformité des matières premières. À la clé, une réduction des ruptures d’approvisionnement, des retards de production ou des sanctions potentielles.  

Pour ce faire, elles peuvent s’appuyer sur la puissance de l’intelligence artificielle (IA), couplée à l’analyse de données : grâce à l’optimisation, l’automatisation et la prédiction, l’IA aide à anticiper les risques autour de la supply chain, et donc d’éviter les coûts de gestion de crises et les perturbations associées. Cette technologie est également un levier pour la résolution proactive des problèmes pour garantir la continuité des opérations, et améliorer l’efficacité opérationnelle en adaptant en temps réel la production et la logistique.  

La sécurisation de la supply chain permet ainsi de renforcer sa robustesse, de faciliter la traçabilité des produits et de positionner les entreprises en acteurs responsables. 

  1. Piloter et réorienter le portefeuille produit : pour renforcer l’innovation et la compétitivité 

Faire face aux risques présents et futurs exige de mettre en œuvre une transformation du portefeuille vers des produits résilients et à faible impact. À cette fin, les directions pourront doter les services achats d’outils d’aide à la décision. Pour chaque catégorie de produit, une analyse croisée entre ses bénéfices (rentabilité, image de marque, innovation…) et sa résilience (fiabilité de l’approvisionnement, conformité ESG, moindre exposition aux risques…) permettra de déterminer la valeur relative à lui accorder dans le portefeuille pour rendre celui-ci plus sûr, plus durable, et plus stratégique.  

Cet outil pourra être également utilisé par d’autres départements, tels que la Recherche & l’Innovation pour promouvoir une conception à l’épreuve du temps ou encore le Marketing, afin d’illustrer les choix durables réalisés par l’entreprise.  

En permettant aux entreprises de réduire leurs risques juridiques (procédures de rappels, sanctions réglementaires), d’anticiper les attentes des consommateurs, de s’ouvrir à de nouveaux marchés et de renforcer leur conformité réglementaire, la réorientation du portefeuille produit constitue un formidable levier de compétitivité, d’innovation et d’optimisation des coûts à long terme.  

  1. Communiquer de manière innovante et transparente : pour renforcer la confiance des clients et des investisseurs 

Capitaliser sur les données extraites des cas d’usage ci-dessus permet aux acteurs investis dans la transformation durable de construire une information transparente sur l’impact de leurs produits. Objectif : renforcer la confiance de leur écosystème (B2B, B2C, et investisseurs).  

Concrètement, il s’agit de doter les clients finaux d’une information complète, accessible et à jour sur la traçabilité et l’éthique des produits, mais également des conseils sur leur utilisation, leur composition et leur recyclage. Ces connaissances permettront aux parties prenantes de devenir des acteurs éclairés et responsables, capables d’authentifier les produits et de les comparer avec leurs équivalents sur le marché.  

Cette transparence dans la stratégie de communication sera clé en cas de crise (ex : scandale textile, pollution minière…). Elle permettra aux entreprises de mieux maitriser les risques réputationnels, éviter les bad buzz, les boycotts ou les pertes de parts de marché. 

Conclusion 

Avec la CS3D, la réglementation pousse les entreprises à transformer leurs pratiques tout au long de la chaîne de valeur de manière à traduire leurs engagements sociaux et environnementaux en actions concrètes. Toutefois, le passage à l’action ne pourra s’amorcer sans les prérequis nécessaires à toute transformation durable :   

  • une stratégie RSE claire, pilotable, connue de tous et articulée avec le business ;  
  • un travail en profondeur de la donnée ESG de l’entreprise pour pouvoir l’harmoniser, la maîtriser (qualité, volume…) et l’actionner sur l’ensemble du triptyque ESG ; 
  • la traçabilité des produits sur toute la chaine de valeur via des démarches telles que le Digital Product Passport

Seule la combinaison de ces trois piliers permettra aux entreprises d’actionner efficacement les leviers de la transformation durable et de mettre celle-ci au service de leur performance de long terme.