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La durabilité, nouvelle alliée pour la résilience de la supply chain

Nathalie Girardin & Gilles Bacquet
12 septembre 2023

La résilience d’une supply chain ne se mesure pas seulement à sa capacité à surmonter les crises géopolitiques, la conjoncture économique ou la mise en place d’une disposition réglementaire.
 

Optimisée par des technologies comme la data et l’IA, on anticipe les événements et améliore la capacité de rebond de la supply chain pour mieux saisir les opportunités, sources d’efficacité et de croissance durable. 

Dans une économie toujours plus mondialisée et interconnectée, la gestion des risques associés à la supply chain constitue un défi d’une ampleur inédite. La raréfaction des ressources (matières premières et composants industriels) combinés aux impératifs RSE ajoutent une pression supplémentaire sur l’approvisionnement et le commerce. 

Seule une supply chain résiliente est en mesure de résister aux incidents et au changement climatique grâce à des scénarios d’évitement qui permettent d’atténuer les conséquences des crises et de se rétablir rapidement.

La flexibilité et l’agilité apportent une réponse aux événements prévisibles (l’arrêt d’exploitation d’une ressource…) et imprévisibles (l’embouteillage du canal de Suez).  

Celle-ci implique des moyens d’acheminement et des options de route multiples, de tracer en temps réel chaque étape de la chaîne, faire appel à des fournisseurs eux-mêmes flexibles et résilients et surtout diversifiés… Sans compter les opportunités de rationalisation, comme produire localement et utiliser des énergies peu carbonées, ou réduire l’impact lié au transport.  

La dépendance de certaines industries européennes (automotive, producteurs de médicaments, laboratoires…) vis-à-vis de fournisseurs asiatiques s’est révélée problématique durant la pandémie, même après qu’elle se soit dissipée en Europe.

La résilience d’une supply chain dépend aussi des sous-traitants qui produisent de façon durable et responsable, à un prix juste, avec un contrôle en temps réel de la bonne conformité des pièces afin de réagir, le cas échéant, dès les premiers signes de manquement.  

En cela, la supply chain résiliente ne se conçoit pas comme à la mise en œuvre d’un arsenal défensif contre les perturbations, mais comme un système de surveillance et d’analyse au bon temps, permettant de prévoir les risques. La capacité d’anticipation constitue alors un formidable levier pour l’amélioration de la performance opérationnelle et la croissance durable. 

Des jumeaux numériques pour une meilleure maîtrise des risques environnementaux  

Construire cette résilience impose une parfaite connaissance de toutes les dimensions de la chaîne logistique — depuis la ligne de production des fournisseurs de matières premières jusqu’au point de livraison chez le client.

Cette vision à 360 degrés, atteinte grâce à la centralisation de la donnée et à la puissance des outils d’analyse, permet de mieux synchroniser l’offre, la demande et les flux logistiques, pour mieux les ajuster en fonction des événements.  

La supply chain résiliente s’appuie, pour cela, sur des simulations opérées sur des jumeaux numériques, alimentées par une multitude de scénarios et si ?, en tenant compte des aléas possibles. Des outils de planification de la supply chain optimisés grâce à l’intelligence artificielle, peuvent ainsi être déployés pour anticiper les besoins de l’entreprise, ajuster ses commandes fournisseurs en temps réel et sécuriser ses fonctions opérationnelles, qu’il s’agisse de l’approvisionnement ou de la livraison. 

Efficience opérationnelle 

L’approche data améliore également l’efficacité et la performance économique de la supply chain. Elle s’avère tout aussi indispensable pour garantir sa pérennité, à l’heure où les enjeux RSE dictent les activités des entreprises.

En intégrant les données liées aux impacts environnementaux et sociaux dans les scénarios et si ?, les simulations révèlent à la fois des risques (un fournisseur incapable de suivre les évolutions réglementaires par exemple) et des axes de progrès (une route commerciale plus efficiente en termes de consommation d’énergie, des exploitations de matières premières plus durables…).  

La capacité de projection constitue une aide à la décision précieuse pour la construction de stratégies d’entreprise responsables, durables et porteuses de croissance.  Les bénéfices d’une supply chain pilotée par les données sont d’ores et déjà mesurables. Grâce à des simulations d’optimisation de la gestion de contenants retournables (flux et remplissages), Capgemini a ainsi permis à l’un de ses clients de réaliser, en un an, une réduction de 200 tonnes d’émissions de CO2 et une économie de plus de 100 millions d’euros. 

Collaborer pour construire des référentiels communs 

Si quelques industries (aéronautique, automobile, nucléaire, cosmétique…) semblent avoir atteint une certaine maturité, beaucoup de secteurs progressent à petits pas dans la transformation de leur supply chain. Celle-ci impose en effet de mettre en œuvre des actions communes à l’ensemble de l’écosystème pour agir dans une même direction et, en particulier, d’ouvrir les données de l’entreprise. Nous pouvons citer l’exemple de la coalition CATENA-X, rassemblant des acteurs du secteur automobile français dont l’ambition est de se doter d’un référentiel de données communes permettant de favoriser les synergies et booster la digitalisation de la supply chain. 

Les entreprises doivent accepter l’idée que le partage de données ne constitue pas un risque de perte de souveraineté mais une condition sine qua non de progrès.

C’est surtout la seule voie possible pour répondre aux nouvelles réglementations en matière de RSE. A titre d’exemple en 2026, un « passeport batterie » décrivant ses caractéristiques et l’origine des composants, sera ainsi obligatoire pour toutes les voitures neuves. Cette disposition impose donc une traçabilité de chaque composant de la batterie, et ce, dès l’extraction du lithium. Sans base de données ni plateforme numérique communes aux constructeurs, un tel tour de force semble hors d’atteinte.  

Si le chemin à parcourir peut paraître long, les technologies du numérique sont nécessaires pour conduire la supply chain vers la durabilité. 

Auteurs

Nathalie Girardin

Head of Sustainability for Intelligent Supply Chain Center of Excellence
Diplômée en Achat International, et en management de projet auprès de l’ESSEC et de University of California, Nathalie a occupé depuis plus de 20 ans des fonctions sur les Supply Chain amont et aval, notamment en Retail, Industrie, Produits de consommation et Luxe, en France et en Amérique du Nord. Ce parcours lui a permis d’acquérir une connaissance 360° des problématiques et enjeux des Supply Chain. En 2022, Nathalie a rejoint le Centre d’Excellence Intelligent Supply Chain au sein de la division PBS (Package Based Services) de Capgemini pour développer des projets de Supply Chain durable et de Control Tower. Elle manage également des projets de déploiement de solutions logistiques WMS et TMS.

Gilles Bacquet

Senior Portfolio Manager
Diplômé en tant qu’ingénieur en Production – Supply Chain en 2000 complémenté par un Executive MBA en 2016, Gilles a rejoint le groupe Capgemini en 2001 en tant que consultant dans des activités de maitrise des fournisseurs pendant plus de 10 ans. Après une expérience à l’internationale, Gilles a rejoint les équipes Toulousaines en 2015 pour développer des activités logistiques pour un grand compte aéronautique et a intégré en 2021 les centres d’excellence en tant que responsable de l’offre Chaine logistique résiliente et durable au sein de Capgemini Engineering. Après une expérience à l’internationale, Gilles a rejoint les équipes Toulousaines en 2015 pour développer des activités logistiques pour un grand compte aéronautique et a intégré en 2021 les centres d’excellent en tant que responsable de l’offre Chaine logistique résiliente et durable pour la division Capgemini Engineering.