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Sans agilité, le cloud est une symphonie inachevée

Capgemini
23 décembre 2019

Le cloud est l’outil privilégié des équipes agiles car il leur permet d’atteindre leur objectif fondamental : maximiser le rendement de valeur pour le client final.

Mais si le cloud est indispensable à l’agilité, qu’en est-il de la proposition inverse ? Sans agilité, peut-on réellement tirer bénéfice de tous les avantages du cloud ?

Depuis quelques années, la vocation première de l’organisation IT connaît une profonde évolution. De prestataire interne chargé de garantir la qualité des services rendus aux métiers, elle devient un créateur de valeur à part entière au service de la stratégie de l’entreprise. Le cloud et les méthodes agiles sont les deux piliers sur lesquels repose ce changement de paradigme. Les méthodes agiles parce qu’avec des cycles de développement raccourcis, le DevOps et l’automatisation, les livraisons se sont accélérées, ce qui a permis de réduire les délais entre le besoin métier et la réponse IT, et donc d’apporter plus rapidement un bénéfice tangible.

Le cloud parce qu’en déchargeant l’IT d’une partie de ses responsabilités en matière d’infrastructures et de qualité de service, il lui permet de se concentrer davantage sur la création de valeur. Mais désormais, c’est sur cet aspect que l’IT est attendue et jugée. Elle doit accélérer le time-to-market, favoriser l’innovation, contribuer au développement de nouvelles offres… Autant d’exigences qui nécessitent de tirer au maximum parti des capacités offertes par le cloud, et donc de s’organiser en conséquence.

Le cloud, trop rapide pour les cycles en V.

Dans un cycle en V classique, on ne commence à développer qu’une fois toutes les caractéristiques du produit spécifiées, y compris son architecture. Or, cette phase d’analyse et de conception détaillée est longue, et pendant ce temps, le cloud a déjà évolué ! Dans cette phase d’analyse, et par manque d’expérience concrète des nouveaux ou futurs moyens mis à dispositions par le cloud, les spécifications ont tendance à n’utiliser que des caractéristiques stables, donc les plus basiques pour garantir la pérennité de ces spécifications.

Par sécurité, on opte pour des modèles IaaS, qui ne sont guère plus qu’une forme d’hébergement distant, et ne tirent pas partie des optimisations des solutions cloud natives. Quant aux développeurs, ils s’accommodent de cet environnement mais ils ne sont pas en mesure de challenger l’architecture choisie, ni d’utiliser tous les outils de productivité proposés par le cloud. Une partie des bénéfices d’innovation et d’accélération que pourrait apporter le cloud est donc perdu.

En mode agile, au gré des cycles d’exploration, de développement, et de l’évolution des besoins, il arrive que l’on se heurte à une impasse technique, mais on conserve, pour y échapper, la possibilité d’adapter l’architecture à ces nouvelles contraintes. On parle d’architecture émergente : l’infrastructure se construit en même temps que l’application, seuls quelques principes de base ayant été posés au préalable.

À l’inverse, dans un mode traditionnel, si l’on s’aperçoit par exemple qu’une ressource spécifiée à l’origine en IaaS serait finalement plus pertinente en PaaS, il faut repasser par un processus de spécification, ce qui allonge considérablement les délais. Il en va de même pour le dimensionnement des caractéristiques techniques. Pour éviter de remettre l’ouvrage sur le métier, on s’en tiendra à des choix prudents sans réellement profiter de l’élasticité du cloud qui permet de s’adapter à la hausse comme à la baisse à la demande réelle. Là encore, en décidant à l’avance, on ne tire qu’imparfaitement parti de l’un des bénéfices clés du cloud.

Une agilité nécessaire au-delà des projets

Changer de méthodologie projet pour une approche agile n’est toutefois pas suffisant. Réduites et pluridisciplinaires, les équipes agiles sont d’autant plus efficaces qu’elles sont autonomes. Pour cela, le mode self-service du cloud est idéal. Or, trop souvent, l’IT aborde le cloud comme une simple ressource  supplémentaire qu’elle intègre à ses processus traditionnels de gestion de services et qu’elle distribue via ses anciens canaux. Inutilement alourdies, ces procédures pèsent sur l’efficacité des équipes et, au final, les délais de livraison.

Ainsi, en ne diffusant pas l’agilité, sa culture collaborative et sa structure itérative et incrémentale au reste de l’organisation, on crée de nouveaux goulets d’étranglement qui anéantissent en partie les progrès réalisés au niveau du développement, engendrant délais et frustration. Cette absence d’agilité à l’échelle nuit en particulier au cloud, qui se retrouve fatalement sous- ou mal exploité.

Si aucune boucle d’amélioration rapide n’est mise en place, l’obsolescence se propage d’autant plus rapidement que le cloud évolue très vite. Les inefficiences s’additionnent et la dette technique s’accumule. La stabilité et la durée de vie qu’offraient les systèmes legacy sont devenues inimaginables car les technologies se périment désormais très vite. Les dérives prennent rapidement une ampleur irrémédiable et une grande partie des bénéfices potentiels du cloud se perd dans les abîmes d’une maintenance complexe, en retard permanent sur l’état de l’art.

Le cas exemplaire de la gestion financière

La nécessité d’être agile à l’échelle pour tirer pleinement parti du cloud trouve une illustration particulièrement éclatante avec les services financiers et les achats. S’ils n’ont pas eux aussi opéré leur mue agile, il leur est difficile, voire impossible, de sortir de leur logique budgétaire pour adopter la logique de consommation du cloud. Ils ont du mal à accepter que l’on ne sache pas au début d’un projet quel en sera le coût, puis à s’adapter à ses fluctuations.

Il arrive même que, par manque de suivi, des projets doivent paradoxalement s’arrêter parce qu’ils étaient prometteurs, faute d’obtenir les investissements qu’aurait nécessité leur montée en puissance. Pourtant l’un des points forts du cloud, sa tarification à l’usage s’accorde mal aux modèles financiers traditionnels, et sans une gouvernance agile des coûts entre l’IT et la gestion financière. C’est là encore un avantage qui reste insuffisamment mis à profit, et génère l’apparition de métiers dédiés à cette collaboration : le FinOps.

Alors que les bénéfices du cloud sont maintenant connus et largement validés, on constate qu’ils ne peuvent être obtenus en totalité sans une agilité globale de l’organisation. Parce qu’il est devenu pour l’entreprise un outil essentiel pour exécuter sa stratégie, c’est toute la chaîne de valeur qui doit s’adapter à ses spécificités. L’agile à l’échelle, tel que le propose notamment le framework SAFe, répond à ce besoin d’un fonctionnement agile ordonné et coordonné entre toutes les fonctions de l’organisation. Alors seulement l’entreprise pourra achever la symphonie débutée avec l’adoption du cloud.