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5G hybride : les promesses d’une couverture sans couture

Patrice Duboé & Cédric Bourrely
7 novembre, 2023

Alors que le déploiement des réseaux 5G publics et privés s’accélère sur les marchés des télécommunications grand public et industrielles, la convergence des moyens terrestres et spatiaux ne cesse de prendre de l’importance auprès de nombreux acteurs. Emergence du « New Space », démocratisation de l’accès aux satellites, mise en place de normes communes ou encore participation massive des grands acteurs de la tech, l’hybridation des réseaux est aujourd’hui l’une des grandes tendances du marché de la connectivité. 

Jusqu’à présent les performances des réseaux satellitaires les limitaient à des usages ne nécessitant pas de hauts débits ni de faibles latences. Désormais grâce au déploiement de constellations de satellites en orbite terrestre basse (OTB ou LEO en anglais), il est possible d’envisager des utilisations et des flux de données compatibles avec la 5G terrestre.

En associant la puissance des réseaux terrestres à la flexibilité des constellations basse orbite, la 5G hybride est porteuse de nouvelles opportunités pour les entreprises, préparant ainsi l’arrivée sur le marché de la 5G NTN (pour “Non terrestrial Networks”).

On distingue deux familles d’usages des réseaux hybrides qui permettent :

  • D’étendre la couverture réseau opérateur pour les particuliers et les entreprises.  
  • De créer des bulles de connectivité dans les domaines industriels ou de sécurité, par exemple pour le suivi de biens en déplacement.  

Les enjeux sociétaux de l’hybridation

L’accès au numérique est devenu un besoin fondamental pour les citoyens comme pour les entreprises, les zones blanches, vierges de toute connectivité, représentent 2 % de la population française en 2023, habitant pour la plupart des zones reculées en campagne ou en montagne. En parallèle, la couverture mobile et internet reste très limitée dans les ‘zones grises’ qui représentent aujourd’hui 38% de la population française. 

Pour garantir l’équilibre des territoires, la seule solution envisageable aujourd’hui passe par le satellite. Déployer la fibre ou parsemer d’antennes 4G ou 5G les régions les moins densément peuplées ne sont pas des options économiques et durables. L’alternative la plus évidente ? Construire une couverture hybride, grâce à la complémentarité des réseaux terrestres et spatiaux, pour une connectivité haut débit « sans couture ».

Une solution pour les problématiques de sécurité publique

La combinaison des réseaux terrestres et non terrestres offre par ailleurs une réponse à des problématiques liés à la sécurité des biens et des personnes. On pense d’abord aux bulles de connectivités (ou « bulles tactiques »), dans la défense ou la sécurité publique. 

En cas d’incendie, d’inondation ou de tremblement de terre, les satellites peuvent prendre le relais lorsque les réseaux terrestres sont coupés ou saturés. Ces bulles de connectivité déployées à terre permettent la conduite des Opérations in-situ. Elles permettent de rétablir le lien avec le monde extérieur, hors zone de désastre, grâce au satellite.

Une réponse technologique aux défis industriels contemporains

Il en va de même pour les activités industrielles opérant dans des zones reculées (éolien offshore, photovoltaïque en rase campagne, barrage en haute montagne…), et pour lesquelles les moyens de communication terrestres sont prohibitifs ou technologiquement compliqués.  

On pense également à la supervision de biens en mobilités pour les acteurs de la chaine d’approvisionnement. Le satellite apporte une dimension à la fois mondiale et continue, à coût compétitif pour suivre les biens tout au long de la chaine d’approvisionnement multimodale (maritime, ferroviaire, aérien). 

Les infrastructures et les opérations critiques sont des domaines importants pour l’utilisation des technologies de réseaux hybrides. Cela est encore plus vrai avec le l’accélération des déploiements 5G en remplacement des technologies Tetra vieillissantes.

Un assemblage encore complexe dans un écosystème fragmenté 

La mise en place de réseaux hybrides a amené son lot de transformation tout au long de la chaine de valeur des télécoms.

Les opérateurs et les entreprises devront appréhender de nouveaux concepts techniques, auprès d’acteurs très diversifiés afin de maîtriser les implémentations de bout en bout.    

Il est tout d’abord question de comprendre comment les réseaux vont être interconnectés : quelles architectures ? Quels liens physiques entre les cœurs de réseau ? Quelles typologiques d’antennes ?  

Quel déport de charge réseau entre les appareils et les équipements radio (relais antennaire sol vers l’espace ? Quel lien des équipements en direct vers l’espace ? etc…), ou encore quelle utilisation des modules phares de la 5G (Network Slicing, MEC…) pour tirer le maximum de ces setup hybrides ?  

On pense ensuite nécessairement aux dépendances envers les acteurs de l’industrie des puces et des terminaux : quelles feuilles de route de connectivité ? Quelles fonctionnalités pour quelles performances ? Quel degré de souveraineté dans les réseaux et fournitures d’équipements ?  

L’extension de réseau est un grand défi pour les opérateurs télécom, aujourd’hui peu habitués à interconnecter leurs réseaux avec le monde du spatial. Les chantiers sont nombreux (accords de roaming, nouvelles architectures réseau, certification des équipements) et devront être menés avec attention afin d’offrir des services de qualité aux clients, qu’ils soient particuliers ou professionnels. Enfin, il faudra trouver des modèles économiques et écologiques viables pour garantir une innovation vertueuse, profitable et bénéfique. 

Le début de l’histoire et la nécessité d’expérimenter pour comprendre

Dans ce contexte complexe, Capgemini et l’Agence Spatiale Européenne collaborent autour des réseaux hybrides.  Le Lab 5G parisien de Capgemini et le 5G/6G Hub de l’ESA à Oxford (Royaume Uni) ont été interconnectés via des réseaux satellitaires en orbite basse. 

L’initiative en cours vise à tester les moyens techniques et la chaîne de valeur entre 5G terrestre et satellitaire dès 2024. L’objectif est de démontrer les utilisations possibles et la faisabilité opérationnelle de cette hybridation.    

Les possibilités apportées par les réseaux hybrides sont immenses, et dévoileront tout leur potentiel avec l’arrivée à maturité des solutions technologiques, normes et modèles. L’accélération et les grandes tendances opérées par le marché, combinées à l’arrivée à maturité des réseaux 5G en font un sujet technologique d’actualité majeur, sur lequel il convient de se pencher dès à présent. 

Auteurs

Patrice Duboé

EVP – CTIO South & Central Europe

Cédric Bourrely

Directeur de programme 5G Labs, Capgemini Invent
Cédric Bourrely est en charge des activités de Conseil autour des technologies Emergentes chez Capgemini Invent. Il intervient principalement sur les thématiques des apports des nouvelles technologies, notamment Connectivité (5G, IoT…),  Intelligence Artificielle et technologies décentralisées (Blockchain), dans les secteurs de l’Industrie, des Infrastructures Critiques, de la Sécurité Publique et de la Défense.

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