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Cloud et Green IT

Skander Guetari
30 juin 2021

Comment entrer dans un cercle « vert-ueux » ?

Le Cloud est-il « green » ? La question peut paraître rhétorique. Mais elle ne l’est pas. Elle prend une importance majeure dans un monde – politique et économique – de plus en plus sensible à la bonne utilisation des ressources, à l’empreinte carbone des usages, à l’utilisation des énergies renouvelables, au recyclage et à la circularité.

Cette profonde évolution vers une sensibilité plus écologique a une influence sur toutes les entreprises. Désormais, elles sont aussi jugées et évaluées sur cette dimension « verte », que ce soit par les instituts spécialisés,  les financiers ou encore leurs clients.

Importance grandissante de la « Green Line »

Des éditeurs de solutions B2B commencent même à parler de « green line », c’est-à-dire de capacité à produire et à travailler de manière durable. Cette « green line » se positionne, dans les préoccupations, au côté de la « top line » (les revenus) et de la « bottom line » (les bénéfices nets). Or la transformation digitale passe en grande partie par le cloud. D’où l’importance de cette question pour les entreprises : « mon cloud est-il, oui ou non, durable et « green » » ?

Actuellement, on lit tout et son contraire. Les détracteurs du cloud public avancent qu’il est, par définition, plus énergivore du fait du nombre grandissant de serveurs qui sont concentrés par rapport à un data center d’entreprise. Ses défenseurs avancent, au contraire, que la mutualisation à l’œuvre dans un cloud public est un « vecteur de réduction d’empreinte carbone », comme le résume le cabinet IDC, et un vecteur d’innovation pour implémenter des énergies plus vertes.

Data centers 

Nul ne peut nier que les data centers sont très demandeurs en énergie. En 2019, cela a représenté près de 1 % de la demande énergétique mondiale, et c’est une demande grandissante. Certains des plus grands hyperscalers ont pris des mesures importantes pour alimenter leurs centres de données avec des énergies renouvelables.

Microsoft, par exemple, a annoncé son intention de passer à une énergie 100 % renouvelable pour faire fonctionner ses centres de données d’ici 2025. Google prévoit également de passer complètement à une énergie sans carbone d’ici 2030. Cependant, la majorité des centres de données sont encore largement alimentés par des énergies fossiles. Selon l’enquête publiée par le Capgemini Research Institute, seules 17 % des organisations ont déployé des mesures pour utiliser des sources d’énergie verte dans leurs centres de données.

Vers une information plus transparente sur la durabilité des clouds

Tous les grands Cloud Service Providers (CSP) mènent des initiatives très positives (neutralité carbone, zéro carbone, voire annulation de leur empreinte carbone historique). Les acteurs du data center soulignent eux aussi, à juste titre, l’amélioration continue de l’efficience énergétique des serveurs et des infrastructures (alimentations, onduleurs, climatisation, etc.) ou les innovations dans la construction des bâtiments.

Il n’en reste pas moins que quelques CSP peinent à fournir une information transparente à leurs clients sur leur mix énergétique, sur la fabrication et les cycles de vie de leurs équipements, voire sur l’impact carbone d’une zone de disponibilité en particulier (Availability Zone). Certains CSP ne fournissent aucun outil pour aider à faire des choix éclairés en termes de numérique responsable.

À leur décharge, il n’existe pas encore de référentiel ou de label pour le cloud, sur le modèle de ce qui existe aujourd’hui pour les serveurs et les équipements sur site (type Energy Star). La plupart des outils actuels se concentrent sur les coûts financiers et l’efficacité opérationnelle plutôt que sur le coût en carbone.

Cela étant, les choses bougent. L’Institut du Numérique Responsable a par exemple publié en mars 2020 un outil, baptisé WeNR, permettant l’évaluation de l’empreinte carbone de l’architecture d’un service IT hébergé dans un cloud. Son module est encore en bêta, mais c’est un très bon début.

Un protocole clair

De son côté, Capgemini a étudié dans le détail les implications du cloud sur le climat pour aider à entrer dans un cercle plus « vert-ueux » alors que les offres se multiplient et que l’écosystème s’enrichit. Pour cela, nous travaillons avec les fournisseurs selon un protocole clair pour aboutir à des mesures concrètes. Nous questionnons les CSP à travers une check-list, inspirée de la méthode ACV (analyse de cycle de vie) de l’ADEME, pour les aider à manifester leur engagement selon des KPIs précis, notamment sur le pourcentage d’utilisation d’énergie dite verte, actions pour la réduction du PUE (Indicateur d’efficacité énergétique), méthode de recyclage des équipements, etc.

Toujours dans ce cadre, et lors d’un projet move to cloud, Capgemini réalise une analyse d’impact avant le déploiement d’une application à grande échelle. Car il convient d’établir un rapport entre les coûts de l’énergie et d’émission carbone d’un côté, et les avantages du déploiement de nouvelles applications de l’autre.

Cette analyse permet de choisir la landing zone où l’impact environnemental d’un service est minimum et de dimensionner les ressources nécessaires au plus juste dans une logique frugale (« Green by design »). Lors du passage en production, cette fois dans une logique d’opération green (GreenOps), le protocole vérifie de façon régulière que les hypothèses et les KPIs retenus sont toujours validés.

À ce stade, mesurer l’empreinte carbone tout au long du cycle de vie est clé. Tout comme il est clé de démocratiser le sujet parmi les équipes IT pour qu’elles mettent toujours dans la balance ces critères environnementaux et les besoins réels en ressources pour les métiers.

Sachant que les données croissent de façon exponentielle. Une piste d’action consiste par exemple à urbaniser les données pour repérer celles dites « mortes » (archives ou versions de sauvegarde non utilisées ou non utilisables) ou les applications pas ou peu utilisées.

Enfin, comme le cloud et la durabilité sont des domaines récents, des progrès sont réalisés chaque jour par les acteurs du monde académique et des start-ups. Votre entreprise doit pouvoir suivre ces évolutions et s’assurer qu’elle adopte les meilleures pratiques. Ce qui implique de collaborer de manière régulière avec des experts du cloud, aussi bien internes qu’externes. C’est un projet d’entreprise à part entière et au long cours.

Des outils et des méthodologies existent

Pour le mener à bien, il existe par ailleurs une multitude d’outils et de méthodologies open source, créés par des organisations et le monde académique, qui permettent de mieux comprendre l’empreinte carbone des opérations. Ces calculateurs de carbone ou même la démarche FinOps participent de cette même logique pour éviter de tomber dans l’illusion d’une capacité cloud infinie.

Chez Capgemini, plusieurs projets de recherche ont été lancés et des outils sont nés comme Greensight, pour analyser l’éco-conception d’un code à travers un référentiel de bonnes pratiques, et Greenermailbox, pour sensibiliser l’utilisateur sur l’impact carbone lors de l’envoi d’e-mails comprenant des  pièces attachées volumineuses.

Nous avons également développé des outils industriels comme eAPM qui permet à une organisation de disposer d’un référentiel unique et complet sur l’impact carbone de son IT et de proposer un plan d’action clair pour l’améliorer. Par ailleurs, Capgemini a publié une nouvelle version d’un framework à destination des architectes, appelé IAF – Integrated Architecture Framework. Dans sa 6ème édition, l’IAF met particulièrement à l’honneur ce sujet de la responsabilité environnementale et l’adresse au-delà de l’aspect infrastructure.

La question aujourd’hui n’est donc plus de savoir s’il est possible d’être cloud et vert, mais bien de choisir comment passer durablement au « Green Cloud ». Capgemini peut vous aider à y voir plus clair, établir une feuille de route verte et choisir les bons outils qui permettent de challenger les cloud service providers.